Quantcast
Viewing latest article 10
Browse Latest Browse All 16

Au cœur de Fukushima, de Kazuto Tatsuta, Kana

Image may be NSFW.
Clik here to view.
au-coeur-de-fukushima-1-kana.jpg
Alors que le Japon commémore la catastrophe nucléaire de Fukushima, il y a cinq ans, sur place les équipes continuent inlassablement de décontaminer et de démanteler le site. Enchaînant les petits boulots et ne pouvant vivre de sa passion de mangaka, Kazuto Tatsuta, motivé par un haut salaire et désireux d’aider son pays, s’est fait embaucher comme ouvrier.

Après y avoir travaillé pendant six mois et avoir atteint la dose limite annuelle de radiations, le trentenaire a décidé de raconter son quotidien dans un manga. Il en a tiré une série à succès au Japon. Le premier volume, sorti ce mois-ci en France, emmène le lecteur à l’intérieur de la zone interdite et le plonge dans le quotidien de ces 3 000 salariés confrontés à des conditions extrêmes dans « les entrailles du cadavre atomique ».

Invisibles

Sans prétendre révéler « la vérité sur Fukushima » ni se risquer à une quelconque polémique sur l’avenir du nucléaire, il veut apporter « en détail et objectivement le témoignage d’un travailleur de la centrale ». À d’autres le soin d’évoquer le devenir des tonnes de déchets, les maladies qui toucheront ces liquidateurs, les sommes à dépenser pour démanteler le site, etc.

Image may be NSFW.
Clik here to view.
au-coeur-fukushima-visual-1.jpg

Pourtant, la nature de ce propos est inédite. Des ouvriers avaient déjà révélé à des journalistes leur vulnérabilité, le manque de moyens, l’indifférence de Tokyo à leur égard. Mais personne n’avait dessiné le quotidien de ces invisibles chargés de démonter la centrale. Ceux qui ont remplacé les techniciens et les pompiers des premières heures. Qui sont ces liquidateurs au long cours, ces soutiers à qui il faudra des années pour nettoyer le site ?

Gâchis

Leurs journées sont remplies d’une succession de procédures à respecter, d’équipements de protection à enfiler, de sas à passer, de contrôles continus de leur radioactivité. Embauchés par une myriade de sous-traitants, ils sont logés dans des auberges ou des dortoirs collectifs. Ils se rendent au travail dans des navettes mises à leur disposition. Par des températures extrêmes, ils œuvrent sans relâche. Ils sont plombiers, grutiers ou gèrent l’intendance du site. Selon leur exposition, certains ne peuvent travailler qu’une heure par jour. Kazuto Tatsuta a dessiné ce qu’il a vu, ce que pensent ces hommes, ce qui les motive, ce qu’ils partagent. Un ordinaire qui devient, au fil des pages, extra-ordinaire.

Si le témoignage semble parfois naïf, il est au final essentiel. Et souvent édifiant, tant il est révélateur d’un gâchis. Un gâchis écologique, économique, industriel et humain. La durée du démantèlement est estimé à quarante ans. Quarante ans et l’indispensable recours à des milliers de liquidateurs.

192 pages, 9,90 euros

Chronique de Aude Boilley
Texte paru dans Sud Ouest Dimanche du 13 mars


Viewing latest article 10
Browse Latest Browse All 16

Trending Articles



<script src="https://jsc.adskeeper.com/r/s/rssing.com.1596347.js" async> </script>